Publié le 31 Janvier 2020
Publié le 30 Janvier 2020
La traction animale, lorsqu'elle était encore la force motrice principale de travail, générait beaucoup de transactions. Il était important pour le paysan d'avoir des paires de boeufs homogènes, dociles, calmes et beaux. Les nombreuses foires et multiples marchés drainaient vendeurs et acheteurs de tout un territoire.
Aux grande foires de Salies-du-Salat, Mirepoix, et aussi dans l’Aveyron, on trouvait de solides et rudes animaux qui avaient passé l’été en estive. La race gasconne à la robe gris foncé, excellente pour la traction, était particulièrement prisée.
La mena
Pour les acquérir et les récupérer, les maquignons partaient en voiture à plusieurs et revenaient à pied en accompagnant les bêtes. Ce déplacement étaient appelé la mena en occitan.
Aimé se souvient : "A deux reprises, j’ai été invité à participer, à cette aventure. Car, oui, c’était une aventure ! Les maquignons se regroupaient et partaient la veille avec une auto (une traction avant Citroën 15 ou 11). Le lendemain, dès 3 heures du matin, les meneurs, s'arrêtaient en route pour un petit déjeuner. Puis, en arrivant, on commençait à rassembler les animaux marqués avec les ciseaux, au dessus de la cuisse, à côté de la queue. Le troupeaux était composé de bœufs, de braus (veaux d'un an environ), de vaches, de génisses.
Vers deux heures de l’après-midi, nous étions prêts pour la première étape. Ces animaux qui descendaient de l'estive se regroupaient assez rapidement. Lorsque nous sortions de la ville, les rues avaient été désertées pour l’occasion. Une fois dans la campagne, j’ai compris pourquoi j’avais été invité.
En effet, sur la route, les bêtes commençaient à prendre le large, dans les champs autour, il y avait de l’herbe, des arbres, autant de tentations pour eux.
J’avais 16 ou 17 ans et j’étais très véloce, pour traverser le fossé, un bond me suffisait. Mais les bêtes repartaient de l’autre côté. Pichon - c'est ainsi qu’on m’appelait - passa delà ! me criait-on (Petit, passe là-bas !). Nous suivions les chemin de traverse (les carretals) qui étaient bien entretenus en raison des passages fréquents. Il n’y avait pas des chemin empierré, il y avait des sources à niveau constant. Plus loin en avant, les deux voitures passaient au devant pour vérifier les obstacles possibles et prévenir les agriculteurs du passage du troupeau Il valait mieux que leurs bêtes ne voient pas le troupeau qui déambulait."
Station de nuit
La nuit avec les animaux avait était prévue au préalable. L'arrêt se faisait chez des amis, des connaissances. Un carré de pré avait été clôturé pour l'occasion, avec des piquets et des fils, il y avait du foin et de de l’eau.
Aimé poursuit : "Nous allions manger, à tour de rôle, une portion au restaurant du coin. Les maquignons dormait à l’hôtel et nous, les meneurs couchés dans la paille, dans une couverture, au plus près des animaux. Ça faisait partie du jeu. Nous repartions le lendemain, tôt, dès le point du jour."
Un curieux cortège
"En route, on nous apportait un copieux petit déjeuner fait de la cochonnaille et autres victuailles bien arrosées. En route les gens venaient nous voir passer : les enfants, les anciens qui nous racontaient leurs parcours.
Nous arrivions enfin à Caraman à la tombée de la nuit. Là on rejoignait un pré, aménagé comme celui de l’étape. Des amis des maquignons venaient récupérer les animaux de chacun d'entre eux. C’était un moment agréable, nous passions presque pour des héros. Et j'ai eu la chance de vivre cette expérience."
L'arrivée du camion, la fin de la mena
"Nos maquignons se sont ensuite cotisés pour acheter un gros camion, s’allouer les services d'un chauffeur et ont fait aussi du transport pour d’autres personnes. En suivant cet exemple, d’autres personnes se sont équipées à leur tour de petites bétaillères et portaient des animaux chez les particuliers ou sur les marchés de la région. Veaux, porcelets, etc...
Certains sont devenus négociants en jeunes veaux (repopets).
Aujourd’hui bien-sûr, rien n'est plus pareil. Tout ce système commercial a disparu. Sur la canton de Caraman, au début des années 60, on recensait plus de 5000 têtes de bovins, aujourd'hui je crois qu'il y en a à peine plus de 600".
Merci à Aimé pour ce témoignage très éclairant et rare et à Serge Arnaud pour le document iconographique.
Ce post fait partie de la série sur le Lauragais agricole d'autrefois. Vos contributions seront les bienvenues comme rappelé dans ce post-ci : Ecrivons ensemble le Lauragais agricole d'autrefois (cliquer dessus)
Pour retrouver facilement ces posts et les voir dans leur ensemble vous pourrez cliquer sur la nouvelle catégorie du blog : Lauragais agricole d'autrefois ou sur l'onglet en haut de page. Ils seront également écrits en bleu pour les distinguer des posts du quotidien de la vie d'Emile.
Publié le 30 Janvier 2020
Publié le 29 Janvier 2020
Publié le 28 Janvier 2020
Pluie dans la nuit, belle journée
Porté 3 remorques de fourrage de la G. ici.
Visite I* pour mémé
* le médecin
Publié le 27 Janvier 2020
Bienvenue sur le blog "Les carnets d'Emile". Ici se raconte le Lauragais agricole d'autrefois, celui des années 40 et 50. Le Lauragais, cette zone géographique d’Occitanie, à l'intersection de quatre départements : Haute-Garonne, Aude, Tarn et Ariège est historiquement de tradition rurale, domaine du vent d’autan et de l'occitan languedocien que les anciens préfèrent appeler le patois.
Vous pouvez naviguer sur ce blog en utilisant les onglets, en haut de la page, pour avoir les articles par thématique :
- "Au quotidien" regroupe les pages de l'authentique carnet de travail du métayer, Emile, mon grand-père, d'il y a exactement 60 ans.
- "Lauragais Agricole d’Autrefois" compile photos d'époque et témoignages exceptionnels que les lecteurs m’adressent en réponse à mon appel du mois d'août (cliquez ici). On y traite techniques de travail, cultures, vie quotidienne à la métairie, traditions, proverbes...
Vous pouvez aussi retrouver les carnets d'Emile sur Twitter : @carnetsemile et Instagram : lescarnetsdemile
Onglet "Au quotidien", une mémoire du travail
Chaque soir, le métayer couchait sur le papier sa journée de travail et son quotidien : détail de ses activités agricoles, considérations météorologiques, événements familiaux ou collectifs (fête locale…).
Cet homme, c'était mon grand-père. Il ne s'appelait pas tout à fait Emile, je respecte son extrême pudeur en lui laissant son anonymat. C'était un taiseux qui écrivait ! On ne trouvera, au long des pages, ni envolées lyriques ni colériques : les sentiments ne se disaient pas, ni ne s’écrivaient, il les gardait pour lui, comme souvent à la campagne, à cette époque. Il ne s'intéresse qu'aux faits puisque ces carnets doivent pouvoir servir pour la suite de la vie à la ferme, ils servent de référence pour comparer, expliquer, jauger les récoltes, les modes de culture, les gains…
A la suite de son père, il a ainsi écrit son travail de paysan des années 40 à la fin des années 80, saison après saison, d'une écriture soignée et avec une constance remarquable.
Ce témoignage est rare dans le monde paysan des années 50 et le caractère exceptionnel est encore renforcé par le fait que le métayage est, au milieu du XXe siècle, un mode d'exploitation déjà presque obsolète puiqu'il concerne seulement 3,4% des exploitations en 1954 selon l'INSEE.
Se révèle ainsi toute la difficulté d'être un miejaire, celui qui partage avec le propriétaire, le produit des quelques hectares qu'il travaille. Les petites parcelles viennent se nicher entre les coteaux joufflus du Lauragais et la Rigole de la plaine qui serpente vers le partage des eaux du Canal du Midi à Naurouze. Pour faire vivre les 4 générations qui habitent sous le même toit et participent toutes de la vie à la ferme, il faut déployer une énergie sans pareille. L'élevage permet de se nourrir et de compléter les revenus tout comme le potager aux dimensions conséquentes.
Emile écrit en creux le portrait d'un Lauragais aujourd'hui disparu, l'esquisse d'un métier exigeant engoncé dans des traditions que viennent percuter les progrès inouïs des années 50, même si cette ‘exploitation, du fait du statut de « métayage" y accèdera à un rythme nettement plus lent.
Ces carnets ont longtemps reposé sur les étagères familiales avant que, grâce à ce blog, ils permettent d'évoquer ce Lauragais d'autrefois dont les paysages actuels portent encore les traces. Un dialogue à travers le temps...
Onglet "Lauragais agricole d'Autrefois", des témoignages, des documents d'époque
Depuis août 2019, face à l'intérêt des lecteurs et des témoignages reçus, ce blog est devenu participatif par la publication de photos, de documents d'époque, de témoignages que les lecteurs envoient. Chacun peut ainsi faire vivre la mémoire du monde agricole des années 40 au début des années 60.
Et il émane de ces témoignages des moments et des modes de vie parfois oubliés, des anecdotes surprenantes, des méthodes de travail aujourd'hui disparues, des curiosités proverbiales savoureuses…
Ensemble, nous pouvons faire vivre cette mémoire du travail et de la vie agricoles d'antan.
Bonne navigation sur "Les carnets d'Emile".
Publié le 27 Janvier 2020
Fini de labourer le sainfoin de la G. Fait les bords avec les bœufs au champ sous le chemin des Clauzes. Visite I.* pour mémé qui a la grippe. A Roou sont venus. Castré 4 petits cochons 600 F.
Publié le 26 Janvier 2020
Vent d'autan humide
Tué 2 cochons en Touzet 144 et 164 kg
Fini de labourer le champ sous la Perrière
Malrieu a fait des anneaux pour le palonnier de la herse
Publié le 25 Janvier 2020
Pluie dans la nuit beau - Fait du bois à la mare du pré. J'ai réglé le fourrage chez Pech - 62600 F
Le Seloudres sont venus
Publié le 24 Janvier 2020
Publié le 23 Janvier 2020
Publié le 22 Janvier 2020
Publié le 21 Janvier 2020
Publié le 20 Janvier 2020
Publié le 19 Janvier 2020
Publié le 18 Janvier 2020
Dégel
Je suis allé à Castelnaudary. Perçu le dernier argent du maïs
36430
94590
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131020 pour 6310 kg
Publié le 17 Janvier 2020
Dans un précédent post, nous avions évoqué les déplacements de la famille rurale en Lauragais dans les années 30 à 50 alors que l'automobile, selon les situations financières, tardait encore à arriver dans la cour de la ferme (voir ici).
Motocyclettes, bicyclettes étaient des moyens de transport plus répandus mais nécessitaient parfois d'organiser l'emploi du temps de chacun des membres de la famille selon l'endroit où il avait à se rendre, ce qu'il avait à transporter et le moment choisi. Les différents témoignages ont aussi mis en lumière que pour les distances de proximité, on marchait beaucoup à pied. C'était le cas pour se rendre la veillée chez les voisins, au village, à la messe.
Pour les marchés et les foires, pour faire quelques achats ou se rendre chez le docteur, on empruntait la ligne de bus lorsqu'elle s'arrêtait à proximité de la métairie ou au village.
Bernard Bennaval se souvient : « C'était un bonheur de prendre le car (Rigal)pour aller à Caraman le jeudi,on n'avait pas école,et comme ça on voyait des gens de tout le canton et plus.Quelle animation,que de marchandises,que d'animaux,et plein de gens qui parlaient en patois...Les cars arrivaient avec plein de panières sur le toit(las descos)qui servaient à emmener les poule attachées deux par deux,il y avait aussi des lapins,des oeufs...Certaines fermières n'achetaient que ce que les oeufs pouvaient payer,pas de dépenses superflues! »
Pour de rares sorties scolaires des enfants ou la participation à des voyages organisés, on prenait également l'autocar.
En voici 2 exemples datant d'époques différentes, 1938 et 1952.
Mes remerciements à J-C. Rouzaud pour le partage des clichés de sa collection. D'autres suivront bientôt pour illustrer d'autres thématiques.
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Publié le 17 Janvier 2020
Publié le 16 Janvier 2020
Publié le 15 Janvier 2020
Publié le 14 Janvier 2020
Dégal- Neige et forte gelée le soir
Le matin avons nettoyé le poulailler et le soir fait des bûches aux noyers du verger
Publié le 13 Janvier 2020
Publié le 12 Janvier 2020
Publié le 11 Janvier 2020
Dans un précédent post (ici), nous avons évoqué les travaux d'hiver à la métairie. Nous allons évoquer ici les veillées d'hiver qui amenaient les familles à se retrouver entre voisins ou parents pour un moment convivial grâce aux souvenirs d'Aimé B.
"A partir de mi-décembre, quand les emblavures et labours étaient terminés, commençait une tradition incontournable : faire des échanges de veillées.
Après le souper (repas du soir en Occitanie où l'on servait souvent la soupe), nous partions bien couverts, équipés de lampes tempête ou à carbure et bien souvent au clair de lune en suivant les sentiers (carreirons) tracés d’une ferme à l’autre.
Nous étions attendus et bien accueillis. Souvent nous commencions la conversation en prenant des nouvelles des uns et des autres, des nouveaux événements, de l'avancée de certains petits travaux.
Les hommes prenaient ensuite place autour de la table pour jouer le plus souvent à la manille coinchée - si on gagnait la partie, les points était doublés - pendant que les femmes s'installaient autour du feu en tricotant ou reprisant les chaussettes.
Les enfants, eux, allaient jouer dans l’étable (l’estable). Au coin du feu, assis sur la caisse à sel, l'ancien de la maison racontait ses souvenirs d'autrefois : la guerre, les tranchée, les gaz, l'ennemi mais il évoquait aussi parfois les sorciers, les jeteurs de sorts. Apres la première manche, les hommes allaient faire un tour dans l’étable, la conversation portait alors sur les animaux.
Dans notre secteur, les veillées avaient lieu le jeudi, jour de marché ou de foire à Caraman. Étaient relatés alors le prix des veaux, le cours du cochon. On évoquait aussi celui qui ne s’était pas décidé, et qui avait finalement repris le veau malgré le risque de diarrhées, de grippes transmissibles sur le champ de foire au risque même de mettre en danger les autres animaux de la ferme.
Parfois c'était simplement le régisseur qui n’avait pas accepté le prix.
La deuxième manche reprenait ensuite. Bien-sûr on servait un peu de vin pour les hommes, celui que chante Jean Ferrat. Pour les dames une tisane était servie avec l’eau qui avait chauffé sur la tôle en fonte du feu.
La dernière manche terminée, on repartait vers minuit. Avant de se séparer,on se rappelait le programme des veillées suivantes pour éviter les doublons ou les erreurs.
Pendant la guerre, c’était un jeu risqué que de circuler la nuit venue. Et si on était tombé sur une patrouille allemande ?"
Merci à Aimé B. pour ses souvenirs ainsi qu'à la famille Nardèze pour ses archives photographiques précieuses.
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Publié le 11 Janvier 2020
Neige - Fait une aste*. Nous sommes allés avec Camille chercher 100 poussins à Castel. IL nous a porté un cochon 18 kg x 250 = 4500 F La CAL a livré 400 kg blé dur.
*De l'occitan asta : un timon. La pièce, longue pièce de bois, reliait le joug à l'outil tiré.